Audits, Santé et sécurité au travail

Les indicateurs HSE indispensables

Comprendre l’état actuel de la SST dans votre entreprise, fixer des objectifs et communiquer les réussites

10 minutes25/09/2023

Vous cherchez à améliorer la santé et la sécurité dans votre entreprise ? Pour cela, il est important de connaître votre situation actuelle, de définir vos objectifs et d’identifier vos axes d’amélioration. Les indicateurs clés de performance (KPI) jouent un rôle fondamental dans ce processus car ils permettent de faire des comparaisons. Cela vous permet d’identifier les faiblesses des processus de santé et sécurité au travail (SST) de votre entreprise et de valoriser vos réussites. Découvrez dans cet article les indicateurs les plus utilisés et les critères à considérer pour sélectionner les indicateurs les plus pertinents pour votre entreprise.

Des indicateurs réactifs ou proactifs ?

Dans le domaine de la santé et la sécurité, les indicateurs clés de performance sont souvent appelés indicateurs de performance en matière de sécurité (SPI). Quel que soit le terme choisi, ces indicateurs peuvent être séparés en deux catégories : les indicateurs réactifs et les indicateurs proactifs. Comme lors de la détermination des méthodes et des priorités en matière de sécurité au travail, il est important de trouver un bon équilibre entre ces deux types indicateurs lors de la définition de vos KPIs. 

Les indicateurs réactifs servent à examiner le niveau de la sécurité au travail de manière rétrospective et par rapport à d'autres entreprises. Ces indicateurs sont basés sur les données recueillies concernant les incidents et les résultats de sécurité, ils relèvent des événements qui se sont produits. On les appelle « réactifs » parce qu’ils concernent des événements passés. Toutefois, ces indicateurs ne permettent pas de déterminer quelles améliorations peuvent être apportées. C’est pourquoi il est utile d’utiliser également les indicateurs proactifs car ils fournissent des perspectives futures. On les appelle parfois « indicateurs de prévention » parce que, contrairement aux indicateurs mentionnés précédemment, ils ne portent pas sur des événements passés mais sur des mesures à mettre en place ou des conditions existantes qui peuvent être corrigées pour éviter de futurs incidents liés à la sécurité.

On tend à analyser les données réactives par rapport aux taux d’accidents, mais cela ne mène à rien. Le problème est là. Il est temps de changer d’approche. Au lieu de regarder dans le rétroviseur, il faut se concentrer sur la direction dans laquelle nous souhaitons nous diriger.

Andrew Sharman, interview pour le Safety Management Trend Report 2021

Comment définir et suivre ses indicateurs

Lorsqu’il s’agit de sélectionner des indicateurs réactifs et proactifs il n'existe pas de solution universelle qui fonctionnerait pour toutes les entreprises. Pour prendre une décision sur les indicateurs à adopter, il faut observer la situation de l’entreprise et tenir compte des obstacles rencontrés et des objectifs à atteindre. Comme toujours, il est important de garantir la comparabilité, la continuité et la transparence. Pour y arriver, et pour que les indicateurs fournissent des données utiles, il est essentiel que les objectifs soient fixés en suivant la méthode SMART :

  • Spécifiques

  • Mesurables

  • Acceptable/ambitieux

  • Réaliste

  • Défini dans le temps

En plus des objectifs et des obstacles spécifiques, il faut penser à prendre en compte la culture de sécurité actuelle de l'entreprise. Grand nombre d'indicateurs de santé et sécurité sont basés sur les signalements des employés. Il est donc très important d’expliquer à vos collaborateurs l’objectif et l'utilisation des indicateurs afin qu'ils les intègrent dans leur travail quotidien. Il est aussi nécessaire de disposer d'un système simple et compréhensible pour signaler et faire le suivi des incidents. Par conséquent, il est recommandé d’utiliser uniquement les KPI pour lesquels on est sûr d'avoir suffisamment de données.

3 points clés pour choisir vos indicateurs :

  • Combiner des indicateurs réactifs et proactifs

  • Les indicateurs doivent refléter de manière significative vos enjeux et défis

  • Suivre uniquement les indicateurs pour lesquels vous disposer suffisamment de données

Les différentes méthodes pour sélectionner les indicateurs :

Accidents et incidents signalés : Taux de fréquence

Il est essentiel que tous les accidents du travail soient enregistrés et consignés dans le registre des premiers secours. En France, l'employeur doit déclarer l'accident à la CPAM dans un délai de 48 heures (hors dimanches et jours fériés). Par conséquent, les entreprises ont collecté les données nécessaires concernant la gravité et la fréquence des accidents. Lorsqu’on les étudie par rapport au nombre d’employés ou au nombre d’heures travaillées, ces données permettent de tirer des conclusions sur la qualité des systèmes de sécurité mis en place. Ce rapport est illustré par le taux de fréquence qui est calculé de différentes manières à travers le monde.

Le taux de fréquence de blessures avec arrêt de travail (TF) est largement reconnu.

  • Taux de Fréquence (TF) : nb d'accidents / heures travaillées x 1 000 000 

Dans certains pays européens, d’autres taux de fréquence d’accidents utilisés concernent les accidents à signaler conformément aux réglementations locales. En France, par exemple, le TF est complété par d'autres formules comme l'indice de fréquence (IF).

  • Indice de fréquence (IF) : (nb d'accidents / nombre de salariés) x 1000

Jours sans accidents

Tout comme le taux de fréquence, le nombre de jours sans accidents est un autre indicateur réactif utilisé dans le domaine de la gestion des incidents. Il mesure le nombre de jours durant lesquels aucun accident ne s’est produit. Comme le montre le Safety Management Trend Report, il est courant de suivre cet indicateur. Toutefois, cet indicateur est à utiliser avec précaution car il peut induire en erreur. Le fait que le chiffre augmente ne signifie pas nécessairement qu'aucun accident ne s'est produit. En effet, il est possible qu’il augmente parce que les employés ont décidé de ne pas signaler les accidents pour essayer (à tort) de contribuer à la sécurité au travail.

Aujourd’hui on peut voir sur des tableaux LED « 200 jours depuis la dernière blessure » ou « 350 jours depuis le dernier accident ». À mon avis cela est un peu trop réactif. En cas d’accident, le compteur est remis à zéro et ce n’est pas très encourageant. Je pense que les KPI de prévention sont beaucoup plus motivants. [... ] Il est plus important de mesurer, de publier et d'être fier des indicateurs de performance préventifs que des indicateurs de performance réactifs. »

Gerd-Jan Frijters pour le Safety Management Trend Report 2021

Presqu’accidents

Les presqu'accidents sont habituellement des incidents qui n’ont fait aucun blessé mais qui auraient pu provoquer des blessures dans d’autres circonstances.

Une fois de plus, il n'est pas recommandé de viser « zéro » presqu'accidents. Il est plus important d’avoir une vision plus nuancée des résultats. Un nombre élevé de presqu'accidents ne veut pas forcément dire que le lieu de travail est dangereux. Au contraire, cela peut indiquer qu’il y a une culture de sécurité ouverte et efficace dans laquelle les employés signalent librement et ouvertement les presqu'accidents. Les responsables de la SST dépendent du fait que les employés signalent les presqu'accidents car ce n’est qu’alors qu’ils peuvent identifier les risques et prendre les mesures appropriées. Si les employés manquent de signaler un presqu'accident, une situation identique pourrait se reproduire et conduire à un accident. Cela est étayé par la pyramide des accidents de Heinrich : 300 situations à risque entraînent 29 accidents avec blessures mineures et 1 accident grave ou mortel. La pyramide des accidents de Heinrich illustre aussi que, compte tenu de leur fréquence relative, il est peu réaliste de viser « zéro » presqu'accident.

Au lieu de chercher à réduire le nombre de presqu'accidents, il serait plus judicieux de se concentrer sur le ratio entre les presqu'accidents et les accidents qui se sont produits. Dans quelle mesure cela correspond à la pyramide des accidents ? Quelles conclusions peut-on en tirer ? Les employés et les managers peuvent ne pas prendre la peine de noter tous les incidents mineurs dans le registre des accidents. Ainsi, il peut être judicieux de chercher à atteindre un ratio entre les presqu'accidents signalés et les accidents survenus qui soit proche des valeurs de la pyramide des accidents. L'augmentation de ce chiffre est un bon indicateur des améliorations apportées à la culture de sécurité de l’entreprise.

Résultats des audits et contrôles

Une bonne structure et un bon système de classification garantissent que toutes les phases des audits internes et externes génèrent des KPI aidant à l'amélioration des processus, allant de la planification et la mise en œuvre des mesures jusqu'à l'identification et l'élimination des non-conformités. Voici quelques exemples de ces KPI :

  • Ratio entre les audits réalisés et les audits planifiés : Cet indicateur compare les objectifs et la réalité et montre l'efficacité de la mise en œuvre des audits par rapport à la réalisation des objectifs de l'entreprise. Un audit est considéré comme efficace lorsque le ratio cible est atteint sans dépasser le seuil de tolérance souhaité.
     
  • Rapport entre les non-conformités et les mesures correctives : L’objectif de ce KPI est de donner un aperçu de la qualité de la culture de l’erreur d’une entreprise. Si les non-conformités ne donnent lieu à aucune mesure corrective ou insuffisante, elles risquent de se reproduire.
     
  • Taux de recommandations par rapport aux mesures de prévention : Ce KPI donne un aperçu de la manière dont une entreprise traite les recommandations issues des audits. La non-exécution et la non-documentation des recommandations peuvent entraîner des non-conformités à l'avenir. Le processus d’amélioration continue de l’entreprise peut aussi encourager à mettre l'accent sur les mesures préventives.
     
  • Nombre de mesures en retard : Les audits comportent souvent des recommandations ou identifient des non-conformités. Toutes les non-conformités doivent être résolues avant l'inspection de suivi ou l'audit suivant. Les retards mettent en lumière la manière dont une entreprise gère sa culture de l'erreur.
     
  • Nombre d’anomalies lors des audits de certification et des audits clients concernant la gestion des audits : Pris isolément, le nombre d’anomalies ne donne aucune indication sur le fonctionnement du système de gestion. Pour pouvoir tirer des conclusions sur la façon dont une entreprise a évolué au cours des dernières années (potentiellement aussi grâce au processus d’amélioration continue) il faut faire une comparaison rétrospective des données.

Les actions correctives et d’actions préventives (CAPA)

Le plan d'actions CAPA cherche les incohérences, les non-conformités et les erreurs, met en œuvre des actions correctives puis des actions préventives. Contrairement à d’autres normes de gestion de la qualité comme l’ISO 9001, le système CAPA (comme l’ISO 13485) est un processus d’amélioration continue. Toutefois, au lieu de servir à améliorer un produit, il vise à éliminer toutes les non-conformités par rapport aux réglementations et normes techniques applicables.

Indicateurs de sécurité comportementale (BBS)

La sécurité comportementale ou Behavior-Based Safety (BBS) est une approche active plutôt que réactive qui permet de mettre en œuvre et de cultiver une santé et sécurité au travail moderne. Le Safety Management Trend Report montre qu’un nombre croissant d’entreprises adoptent cette approche dans le but de promouvoir des comportements plus sûrs et, en fin de compte, un environnement de travail plus sûr.

L’approche BBS repose sur l'intégration de tous les employés d'une équipe et sur l'observation constante des comportements sûrs, soit dans le cadre d'un système où chacun « s'observe », soit en encourageant les employés à signaler individuellement leurs observations. Cette approche examine les comportements sûrs sur les lieux de travail et peut fournir des retours d'information constructifs. L’approche BBS produit généralement de grands volumes de données (une mine d'or pour les KPI et les analyses) mais elle donne aussi une bonne raison d’examiner quelles données il convient de suivre et d'analyser régulièrement.

Les KPI que l’on peut utiliser pour analyser les programmes de sécurité comportementale (BBS) :

  • le nombre d’observations par rapport au nombre total d’observations possibles.

  • le nombre d’observations de comportements sûrs par rapport au nombre total d’observations.

  • le nombre de réponses aux observations par rapport au nombre total d’observations possibles ou au nombre de mesures mises en œuvre par les managers

  • le nombre d’employés ayant suivi une formation sur la sécurité comportementale BBS

  • le nombre de comportements liés à la sécurité qui ont été définis

Compte tenu de la quantité de données générées par les programmes de sécurité comportementale (BBS), les solutions logicielles en ligne offrent un grand avantage. Elles vous permettent de stocker une quantité illimitée de données et de structurer les informations. Un tableau de bord rend les informations clés accessibles sous la forme de KPI et met ainsi en évidence le succès de votre système de sécurité. Vous devez convaincre vos collaborateurs des avantages de ces KPI et obtenir leur approbation et leur accord. Autrement, ces données devront être anonymisées. Quoi qu’il en soit, vous devez garantir que le traitement des données soit transparent et assurer la sécurité des données.

Outlook

Il existe une tendance claire vers une santé et sécurité au travail proactive. Les approches modernes comme la sécurité comportementale et Safety-II complètent les approches traditionnelles en matière de santé et sécurité et permettent d'agir rapidement et de manière préventive plutôt que de réagir une fois que les problèmes sont survenus, ce qui constitue un avantage non-négligeable.

La sécurité proactive contribue aussi à l’émergence des KPI proactifs, qui sont utiles pour compléter les indicateurs réactifs. Bien qu’il existe différents types de KPI, il faut veiller à pouvoir comparer et vérifier les KPI sélectionnés aussi facilement que possible. La capacité de juxtaposer des KPI traditionnels et modernes aide à mesurer l’impact de la théorie sur la pratique et à identifier les mesures qui contribuent réellement à rendre l’environnement de travail plus sûr.

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