Conformité

La Directive de l’UE relative aux lanceurs d’alerte

Tout ce que les entreprises doivent savoir sur la mise en œuvre et les exigences en matière de systèmes d'alerte

6 minutes 07/09/2021

Le Parlement européen a adopté la Directive relative aux lanceurs d’alerte (Directive (EU) 2019/1937) en décembre 2019. Elle vise à protéger plus efficacement les lanceurs d'alerte qui découvrent et signalent des infractions à la loi contre les représailles. Tous les États membres de l'UE doivent transposer cette directive dans les lois nationales correspondantes d'ici fin 2021.  Les entreprises devront alors relever le défi de satisfaire aux nouvelles exigences et obligations. Il est donc vital que les entreprises abordent cette question très tôt et développent une stratégie interne pour mettre en œuvre les nouvelles réglementations. Cet article fournit des informations clés sur la législation visant à protéger les lanceurs d'alerte, ainsi que des conseils utiles pour vous aider à introduire et à mettre en œuvre un système de dénonciation. 

Contexte de la législation

Les lanceurs d'alerte sont courageux : ils révèlent des pratiques illégales, en étant pleinement conscients qu'ils devront très probablement faire face à des conséquences négatives. Le fait d’alerter est important pour préserver une société ouverte. Jusqu'à présent, seule une poignée d'États membres de l'UE ont accordé aux lanceurs d'alerte une protection suffisante. Il y a eu un manque de garanties transparentes. Les nouvelles réglementations visent à développer des mécanismes appropriés en relation avec le droit européen. 

Quel est l'objectif de la directive relative aux lanceurs d'alerte ?

La directive relative aux lanceurs d'alerte vise à détecter et à prévenir les infractions au droit communautaire, à renforcer les systèmes d'application de la loi et à protéger les lanceurs d'alerte contre toute forme de responsabilité, qu'elle soit civile, pénale, administrative ou liée à l'emploi.  Elle sert à protéger les lanceurs d'alerte contre des conséquences négatives, telles que le licenciement, la mutation ou l'intimidation.  

La directive offre une protection dans de nombreux domaines clés de la législation européenne, notamment :  

  • La lutte contre le blanchiment d'argent 

  • La protection des données  

  • La protection des intérêts financiers de l'Union européenne  

  • La sécurité alimentaire et la sécurité des produits  

  • La santé publique  

  • La protection de l'environnement  

  • La sécurité nucléaire

Quand la nouvelle directive prendra-t-elle effet ?

Il existe deux dates différentes pour les implications juridiques.  Tout d'abord, les autorités et les entreprises de plus de 250 employés doivent avoir mis en place un système d'alerte d'ici le 17 décembre 2021, date à laquelle les États membres de l'UE doivent faire entrer en vigueur les lois et règlements nationaux. Les mêmes règles s'appliqueront également aux entreprises de 50 à 250 employés, mais seulement à partir de 2023.  Bien entendu, les entreprises peuvent également mettre en place des systèmes d'alerte de manière proactive avant la date limite. 

Exigences relatives aux systèmes de signalement

Si les employés n'ont pas accès à un système d'alerte sûr, ils peuvent être contraints de faire appel aux autorités.  Les entreprises peuvent éviter cela en mettant en place des canaux de signalement internes efficaces et confidentiels.  Ces systèmes d'alerte doivent être disponibles à tout moment, offrir la possibilité d'anonymat, disposer d'une interface traduite dans toutes les langues pertinentes et fournir des explications et des instructions claires aux employés. Tous ces éléments sont cruciaux et constituent une base stable pour une communication interne fiable.

Qui la Directive des lanceurs d’alerte protège-t-elle ?

La Directive de l’UE relative aux lanceurs d’alerte mentionne certains groupes qui peuvent invoquer la législation et donc prétendre à une protection lorsqu'ils signalent des violations de la loi : 

  • Les employés (actuels et anciens, ainsi que les candidats à un emploi) 

  • Les fonctionnaires et autres employés du secteur public 

  • Les travailleurs indépendants et contractants 

  • Les stagiaires 

  • Les actionnaires 

  • Les membres de l'organe d'administration, de gestion ou de surveillance d'une entreprise 

  • Les personnes soutenant les lanceurs d’alerte et leurs proches 

  • Les nouveaux employeurs des lanceurs d’alerte ou les personnes autrement liées à ces derniers dans un contexte professionnel. 

La Directive protège ainsi les employés salariés ainsi que les personnes autrement liées à l'entreprise en question. Une exception s'applique aux médecins et aux avocats, qui ne sont pas couverts par les garanties car le fait de signaler une violation serait contraire à leur devoir de confidentialité.  

En outre, les lanceurs d'alerte peuvent toujours être poursuivis s'ils commettent des délits tels que l'intrusion ou la cybercriminalité (par exemple, le piratage de systèmes informatiques et l'accès à des données sans autorisation). Cela ne s'applique pas aux violations d'autres normes ou accords contractuels.  Si, par exemple, un employé pénètre dans le bureau de son supérieur pour faire des copies de documents alors qu'il n'est normalement pas autorisé à le faire, cette violation est protégée par la Directive relative aux lanceurs d’alerte. Les lanceurs d'alerte peuvent déposer des rapports en utilisant les systèmes de rapports internes ou en contactant les autorités compétentes. Par exemple, en cas d'intérêt public important, les lanceurs d'alerte sont protégés s'ils décident de rendre l'affaire publique immédiatement. 

  • Les lanceurs d'alerte sont indispensables au maintien d'une société transparente et ouverte. Votre courage de vous exprimer doit être protégé par la loi européenne sur les lanceurs d'alerte. | © iStock Geber86

De quoi les entreprises doivent-elles tenir compte lors de la mise en œuvre d'un système de signalement ?

Si les entreprises souhaitent intégrer la législation visant à protéger les lanceurs d'alerte dans leurs processus internes, elles doivent garder certains aspects à l'esprit. Voici un aperçu des points clés: 

Champ d'application 

  • La Directive européenne relative aux lanceurs d'alerte concerne : les entreprises de 50 salariés ou plus ou dont le chiffre d'affaires annuel est égal ou supérieur à 10 millions d'euros ; les institutions publiques ; les autorités publiques et les conseils des municipalités de 10 000 habitants ou plus. 

Canaux de signalement 

  • Les entreprises doivent mettre en place un système de dénonciation. Les rapports peuvent être soumis par écrit (en ligne ou par courrier) et/ou oralement (à une ligne d'assistance téléphonique ou à un répondeur).  

  • Les entreprises doivent faciliter les rencontres en personne sur demande.  

  • L'identité du lanceur d'alerte doit rester confidentielle à tout moment. 

  • Exception :  Les entreprises de 50 à 250 salariés peuvent utiliser des « ressources partagées », c'est-à-dire un canal de signalement partagé. 

Obligation d'information 

  • Les entreprises doivent informer leurs employés, fournisseurs, prestataires de services et partenaires commerciaux de leur processus de signalement interne et des autres canaux de signalement (c'est-à-dire les autorités compétentes). 

  • Les informations doivent être faciles à comprendre et à consulter. 

Traitement des rapports / protection des données 

  • Toutes les données personnelles relatives aux lanceurs d'alerte et aux personnes accusées doivent être traitées conformément au RGPD. 

  • Chaque entreprise doit désigner les « personnes les mieux placées » pour recevoir et suivre les cas de dénonciation, telles que les responsables de la conformité, les responsables RH, les juristes internes, les directeurs financiers, les membres du conseil d'administration ou d'autres membres de la direction. Les entreprises peuvent également choisir d'externaliser cette fonction. 

  • Les données doivent être stockées en toute sécurité afin de pouvoir être utilisées comme preuves, le cas échéant. 

Délais 

  • Les entreprises doivent envoyer aux lanceurs d'alerte un accusé de réception dans les 7 jours suivant le dépôt de leur rapport.  

  • Les entreprises doivent informer les lanceurs d'alerte des mesures prises, de l'état des enquêtes internes et de leurs résultats dans les trois mois suivant le dépôt du rapport. 

Résumé

La Directive de l’UE relative aux lanceurs d’alerte entrera en vigueur pour les entreprises de 250 salariés ou plus en décembre 2021. Il est vivement conseillé aux entreprises de cette taille d'explorer différentes options de systèmes d'alerte internes et de les mettre en œuvre dans le cadre de leurs activités avant la date limite. 

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