Conformité, Santé et sécurité au travail

Comment le nouveau cadre stratégique de la SST impacte les entreprises ?

Les grands axes, les impacts et les mesures à prendre

8 minutes11/10/22

Le 28 Juin 2021, la Commission européenne a officiellement lancé son nouveau cadre stratégique pour garantir la santé et la sécurité des travailleurs dans un monde du travail en pleine mutation notamment en lien avec la pandémie de Covid-19.

La mise à jour du cadre stratégique de l'UE en matière de santé et de sécurité au travail pour la période 2021-2027 fait partie du Programme de travail de la Commission pour 2021. Le « socle européen des droits sociaux »  souligne dans son 10ième principe que «les travailleurs ont droit à un niveau élevé de protection de leur santé et de leur sécurité au travail».
Lors du sommet social de Porto organisé le 7 mai 2021 , tous les partenaires ont réaffirmé leur détermination à mettre en œuvre le socle européen des droits sociaux et une Europe sociale forte. Ils se sont engagés à soutenir une concurrence équitable et durable dans le marché intérieur, notamment grâce à des lieux et environnements de travail sains.

Les objectifs sociaux de l'Europe doivent aller de pair avec ses objectifs écologiques et numériques. Nous souhaitons nous rapprocher du plein emploi, offrir à plus d'Européens un accès aux compétences dont ils ont besoin et garantir l'égalité des chances à tous dans une économie plus numérique et durable. Le Sommet social de Porto symbolise notre engagement conjoint en faveur d'une Europe sociale adaptée à l'époque dans laquelle nous vivons et qui profite à tous.

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne

Ce qui change avec le nouveau cadre stratégique

Le précédent cadre stratégique de l'UE en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020) était axé, entre autres, sur la prévention des maladies professionnelles, les mesures à prendre pour faire face à l'évolution démographique et la mise en œuvre de la législation. Parmi les principales réalisations figurent trois mises à jour successives de la directive sur les agents cancérigènes et mutagènes, des lignes directrices et des outils en ligne pour les employeurs mis en place par l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA), notamment en ce qui concerne le COVID-19.

Le nouveau cadre s'appuie sur les contributions d'un large éventail de parties prenantes. Celles-ci comprennent un rapport de l'EU-OSHA sur les stratégies nationales en matière de sécurité et de santé au travail, des recommandations et des auditions devant le Parlement européen, plusieurs conclusions du Conseil, des échanges avec les partenaires sociaux et des experts indépendants, une consultation publique, ainsi que l'avis du comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu de travail et du comité des hauts responsables de l'inspection du travail.

Les accidents du travail et les maladies professionnelles coûtent à l'économie de l'UE plus de 3,3 % de son PIB (460 milliards d'euros en 2019).

Source : «Comparaison internationale du coût des accidents et des maladies professionnels» (EU -OSHA)

Quels sont les principaux objectifs pour la période 2021-2027 ?

Le cadre stratégique 2021-2027 est axé sur trois grands objectifs transversaux :

  • anticiper et gérer les changements dans le nouveau monde du travail, résultant des transitions écologique, numérique et démographique
  • améliorer la prévention des accidents et des maladies professionnels
  • améliorer la préparation à d’éventuelles crises sanitaires futures 

Pour atteindre ces objectifs, des mesures seront prises au niveau de l’UE et des États membres, mais devront également être prises au niveau des branches sectorielles et des entreprises.

Anticiper et gérer les changements, dans le contexte…

  • d’une main d’œuvre Européenne vieillissante nécessitant une adaptation des environnements de travail et des tâches afin de réduire au maximum les risques sur la santé et la sécurité
  • de progrès technologiques (et notamment numériques) rapides apportant son lot de challenges (risque de déclassement, besoins accrus en formation, etc) mais aussi d’opportunités (intégration des travailleurs handicapés, équilibre vie professionnelle/vie privée, mise en œuvre et déploiement des politiques SST via des outils accessibles, des mesures de sensibilisation et des contrôles plus efficaces, etc)
  • d’une évolution des formes de travail, découlant notamment de la numérisation, avec une forte augmentation de la population travaillant à distance, nécessitant des solutions nouvelles et actualisées en matière de SST et un cadre règlementaire revue et adaptée
  • d’un développement accru de la robotisation et de l’intelligence artificielle permettant de diminuer les risques associées aux tâches les plus dangereuses
  • du changement climatique en cours et de ses impacts sur les conditions de travail (par ex. températures extrêmes, pollution atmosphérique)
  • du déploiement rapide des technologies sans fil et mobiles - et leur utilisation accrue à des fins professionnelles - nécessitant une analyse plus approfondie de l’exposition des travailleurs aux rayonnements optiques et aux champs électromagnétiques
  • d’une augmentation significative des risques psychosociaux et ergonomiques accentués par le développement du travail à distance

Améliorer la prévention des maladies et accidents professionnels, en visant notamment à…

  • renforcer la culture de la prévention au sein des organisations conformément à l’approche «Vision zéro»  à l’égard des décès liés au travail dans l’UE
  • insister sur la nécessaire analyse et identification des causes d’accidents (y compris les presqu’accidents et les situations dangereuses), la mise en place de mesures de prévention adaptées, la sensibilisation et formation de l’ensemble des collaborateurs et le contrôle régulier de la bonne application des directives SST sur les lieux de travail
  • lutter contre les causes principales de décès d’origine professionnel que sont les cancers et les maladies circulatoires (maladies cardiaques ou accidents vasculaires cérébraux) mais également l’apparition de nouveaux risques (obésité, dépendance - alcool, tabac, drogue)
  • mieux prendre en compte et prévenir les troubles musculo squelettiques (TMS) qui touchent de plus en plus de travailleurs dans l’UE 
  • actualiser les seuils d’exposition des substances dangereuses (notamment CMR) dans le cadre de la règlementation REACh et évaluer les risques liés à leur utilisation conformément à l’approche «une substance, une évaluation»
  • identifier et combattre les situations de discriminations, harcèlements et violence sur les lieux de travail

Améliorer la préparation — réagir rapidement aux menaces (sanitaires), ce qui passe par…

  • évaluer les risques et identifier les mesures de prévention pour limiter l’impact des crises sanitaires 
  • mettre à jour le cadre règlementaire afin de permettre la reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle dans l’ensemble des pays de l’UE
  • encourager les entreprises à mettre en place des plans de préparation permettant d’anticiper et gérer au mieux les cas de crises sanitaires en milieu professionnel

Les impacts du cadre pour les entreprises

On le voit, le nouveau cadre stratégique SST défini par la Commission EU pour 2021-2027 va apporter des exigences supplémentaires pour les entreprises dans un contexte économique déjà compliqué
En résumé, voici les principaux sujets sur lesquels les entreprises devraient d’ores et déjà porter une attention particulière afin d’anticiper les impacts possibles tant organisationnels qu’opérationnels .

Moderniser et digitaliser les processus SST… pour gagner en productivité et efficacité

Nous rencontrons régulièrement des entreprises ayant déjà mis en place un cadre général leur permettant de traiter les différents sujets en lien avec la SST – de l’identification et suivi des obligations règlementaires, en passant par la remontée des incidents, des accidents de travail, l’évaluation des risques, le suivi des qualifications professionnelles, les plans de formations, les inspections techniques, les audits, les plans de prévention, etc. 

Chaque sujet est souvent traité indépendamment les uns des autres, en silo, même si des liens sont clairement nécessaires d’un point vue opérationnel. Le temps passé à collecter et consolider les informations dans les usines, sur les sites ou les chantiers est très important et les sources d’erreur nombreuses – parfois même l’information n’est simplement pas disponible car non remontée du terrain (par exemple les cas de situations dangereuses).

Pour pallier à ces inefficiences, gagner en productivité, qualité des données et pertinence des analyses, il devient nécessaire de s’équiper d’une solution logicielle intégrée dédiée aux enjeux HSE/SST qui soit complète, simple d’utilisation et évolutive.
 

Anticiper un cadre règlementaire plus contraignant

Comme indiqué précédemment, un certain nombre de textes règlementaires applicables dans le domaine de la SST vont être revus (ou créés) dans les prochaines années afin de renforcer la protection des salariés et inciter les entreprises à prendre en compte l’émergence de nouveaux risques. Il conviendra notamment de surveiller l’évolution des sujets suivants :

  • révision probable de la directive « Machines » portant notamment sur les risques découlant de la numérisation des activités et des machines
  • révision de la directive sur les lieux de travail et de la directive relative aux équipements à écran de visualisation d’ici 2023
  • renforcement des valeurs limites d’expositions 
    • pour l’amiante dans la « directive sur l’amiante au travail », en 2022
    • pour le plomb et les diisocyanates dans la directive sur les agents chimiques en 2022
    • pour le cobalt dans la directive sur les agents CMR en 2024
  • création d’un cadre juridique pour couvrir les risques associés à l’utilisation de systèmes basés sur l’IA notamment ceux pour la gestion des salariés (recrutement, évolutions, etc)

Identifier et prendre en considération de nouveaux facteurs de risques

Il va être également important de prendre en compte, dans les évaluations de risques, ces nouveaux enjeux en fonction des activités et l’identification de ces risques au sein de l’entreprise. Comme indiqué dans le point précédent, il conviendra d’anticiper :

  • l’évolution des seuils limites d’exposition révisés pour certaines substances dangereuses 
  • les défis posés par le télétravail, la numérisation et le droit à la déconnexion
  • le vieillissement de la main d’œuvre et les risques spécifiques qui y seront liés
  • l’accroissement des risques psychosociaux (isolement, burnout, violence au travail, harcèlement, discrimination, conflit)
  • l’ergonomie des postes de travail (troubles musculo-squelettiques)

Renforcer la culture de prévention

La prévention des risques est également un sujet important pour les entreprises en lien avec l’approche «Vision zéro» à l’égard des décès liés au travail. Les priorités d’action porteront sur :

  • L’amélioration de la collecte de données en lien avec les accidents au travail et les maladies professionnelles
  • L’approfondissement des analyses des causes profondes de chaque décès ou blessure en rapport avec le travail.
  • La mise en place et le contrôle de la bonne execution des consignes de sécurité que ce soit pour le personnel interne ou les intervenants extérieurs (audits de sécurité, etc)
  • Un suivi précis des qualifications professionnelles requises pour exercer les activités (notamment celles les plus dangereuses ou requérant une expertise particulière)
  • La mise en place et le suivi des formations internes (règlementaires ou spécifiques aux activités de l’entreprise)

X